mardi 17 juillet 2007

Mourir sur son lieu de travail

Pas grand-chose à dire. Un nouveau suicide sur son lieu de travail, chez Peugeot. Je ne connais ni les causes, ni le pourquoi, ni le comment, et à vrai dire je m’en fous. Mais je lis le résultat. Se pendre n’est jamais une chose merveilleuse…

Pas grand-chose à dire. J’avais moi-même ressenti des choses très dures professionnellement. Des moments où le matin, j’espérais presque que le virage soit pris un tantinet trop vite, pour ne pas à avoir affronter ni le bureau, ni cette boule dans l’estomac. C’était y a longtemps. Enfin, pas si longtemps. Pour moi, la roue a tourné, et le métier que je fais en ce moment me rend non pas heureux, mais satisfait. La nuit je dors. Et mon ventre ne me fait plus mal. Ma tête non plus. Et si mon cœur bat parfois un peu vite, c’est simplement car je vais à des endroits où décidément je ne devrais pas aller.

Pas grand-chose à dire. J’avais parlé l’année dernière d’un début d’étude sur le stress au travail. Je pense modestement que ça devient un fléau. Parce que pression. On a tous de la pression. Mais pour qui est elle ? A une époque, travailler plus gagner plus n’aurait rien représenté pour moi. Jeune cadre, je dépassais les 35 heures par semaine allégrement. Des voyages, des déplacements, des sous qui rentraient dans les caisses de ma société. Des actionnaires heureux, des directeurs satisfaits. Et à la fin du mois, rien de plus. Même pas un merci, même pas un compliment, sinon des promesses non tenues, celles qui n’engagent que ceux qui les écoutent. Et au final, un sentiment de n’être rien. De ne pas travailler assez pour être mieux récompensé. Et à coté, voir des gens plus « dans la place », plus proche de certains, avancer plus vite sans forcément plus de résultat. Avoir le sentiment de courir alors que le concurrent du couloir d’à coté marche sur un tapis roulant.
Dans la nouvelle société où je suis, la médecine du travail a lancé une grande action pour lutter contre ces sentiments et ces sensations qui bouffent une santé, une vie, et qui peuvent emmener à ces situations extrêmes. Cela doit être une préoccupation majeure des syndicats et du monde du travail. Plus importante, pour moi, que ces histoires de grève le 31 Juillet pour protester contre le projet de service minimum, bien plus importante : c’est de vie qu’il s’agit, et on a pas le droit de devenir malade à cause du travail.

Cela passera, à mon avis, sans doute par un rééquilibrage de ce que j’appelle le triangle de l’entreprise : client, actionnaires, salariés. Avec un poids exagérément devenu fort au niveau de l’item central : j’en fus témoin à mon corps défendant.

Pas grand-chose à dire, sinon une réelle tristesse.

8 commentaires:

  1. tétanie à répétition, avec sursaut au moment de passer à l'action sauf un jour en commission de rapports locatifs où je e suis trouvée mal à la grande gêne du locataire dont le dossier était d'ailleurs mauvais. Pendant trois mois chaque année entre trois et quatre heures de travail. Pour les petits cadres des métiers "tertiaires" il n'y a pas beaucoup de remède

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  2. entre trois et quatre heure de sommeil, pas de travail !

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  3. Tiens, j'en parlais pas plus tard qu'il y a un instant avec le Lièvre (oui, je suis mariée avec un homme qui court vite ;-D)...

    Je peux très bien imaginer ce qui a pu conduire (l'image est moyenne puisque c'est Peugeot, je reconnais) ces personnes a commettre le définitif... Mais plus que de stress, c'est surtout de harcellement moral dont il est, à mon avis, question.

    Dans la collectivité où je bosse il y a u aussi une enquête sur le stress au travail... Tssssss, je crois perso que ça ne sert à rien, en tous cas pas auprès de celles et ceux qui sont dans une réelle souffrance.

    Tu le sais, je vis une situation TRÈS compliquée au TAF et si je tiens le coup, c'est parce que j'ai une famille, des amis, un peu de pognon (pour me défouler en bonne occidentale bourgeoise et consommatrice que je suis, hélas !), que j'aime lire, réfléchir, discuter, manger...

    Ceux qui lâchent la rampe (tiens, je me demande si les hommes ne se suicident pas plus que les femmes, faut que j'enquête) doivent être dans des situations à la con et pas suffisamment assurés de leurs compétences (déjà que c'est hardos quand on sait à peu près que l'on fait un boulot correct !)... Après, c'est si facile de flinguer quelqu'un, de le déstabiliser, de l'humilier, de lui faire perdre cette confiance si difficile à acquérir...

    Le monde du travail est globalement assez horrible... Les humains sont globalement assez horribles...

    C'est gai non ce commentaire ? ;-}

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  4. hum vrai mais vrai aussi que l'on finit toujours par rencontrer chez certains l'humanité qu'ils n'ont pas tuée en eux - il est vrai aussi que cela se vérifie surtout si on se maintient hors toute compétition (ce qui paradoxalement peut être payant)

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  5. Jolie discussion que vous engagez là les filles. On sent chez chacune d'entre vous du vécu.
    Evidemment, j'ai pour ma part parlé de ce que je connais le mieux, le monde de l'entreprise. Mais dans toute relation humaine, le phénomène est violent, virulent. Que ça soit dans une pharmacie où ne travaillent que peu de personnes, ou ailleurs. Parfois, c'est le regard de l'autre sur soit qui ammène à ne pas être bien.

    Sinon Bridge a raison aussi, le petit cadre, dans le tertiaire mais aussi dans l'industrie, est souvent une cible de choix. Pas assez puissant pour s'imposer, mais cadre quand même. DOnc souvent corvéable à merci.
    Je reparlerai un jour de la manière dont j'ai vu certains jeunes sortant d'écoles d'ingénieurs (dans lesquelles on leur bourre le crane de salaires annuels faramnieux et de conditions de travail éclatade total) être traité comme du bétail. A qui on promettait la lune en échange d'horaire et de charge de travail indescente. Pour rien.
    Ah si un résultat : les dégouter à 25 ans. Je trouve ça, pour ma part, un peu grave. Et criminel.

    Pour autant, il existe des managers supers. Mon dernier chef dans la boite où j'étais était un homme vraiment bien. Celui qui m'a embauché, directeur technique et trés haut placé dans le groupe, était une perle aussi. Il existe des gens bien, des oasis dans un désert plus ou moins grand. C'est pourquoi tout n'est pas noir. Et la souffrance d'un moment peut laisser présager des beaux jours demain.

    Maintenant et pour finir mon intervention du café du matin, Laflote a raison. Quand ça va pas dedans, il faut profiter du dehors. Des gens qui nous aiment (y en a...) et qu'on aime. Se dire qu'on travaille pour payer la maison et le vin dans la cave.
    Et se dire que le soir, c'est bien de se regarder dans une glace. Certains, lorsqu'ils me parlaient, baissaient les yeux ou regardaient de travers... Amusant... Une voiture de société ne fait pas tout.

    Et même si le monde du travail et les humains sont chacun des loups, il existe des gens biens. Pleins. Donc non, je n'ai pas envie d'être totalement noir.
    Non, ce n'est pas gai, mais mon post initial n'étant pas gai, je ne m'attendais à une série de blagues grivoises ^__^

    Bonne journée

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  6. Mouais, mouais, mouais. Pour vivre indirectement cette situation depuis 6 mois, je rejoins à la fois ce qui a été dit plus haut avec le harcèlement moral, et ce que dit le Faucon sur le triangle infernal "client-actionnaires-salariés" (tiens, on dirait de l'iso 9001 ça^^), le second entrainant bien souvent le premier.
    La pression est bien souvent mise sur un salarié par son supérieur direct, qui est lui même soumis à la pression de sa direction. Les managers efficaces sont ceux qui sont capables de ne pas appliquer un effet rebond à la pression qu'eux-mêmes subissent. Or, ces gens là sont des denrées rares. J'en ai connu aussi, mais je les compte, non pas sur les doigts d'une main, mais sur les phalanges d'un doigt.

    Et, oui, tout le monde n'est pas égal devant la gestion du stress. Il y a le bon stress, celui qui nous fait avancer, qui nous donne les moyens de boucler un dossier en urgence, qui stimule notre cerveau pour que ce dernier trouve les meilleures solutions en un temps record, et puis il ya le mauvais stress, celui qui nous paralyse, celui qu'on somatise (maux de ventre, douleurs musculaires, perte d'appétit et j'en passe), celui qui nous plonge dans la dépression.

    C'est vrai que sur le principe, il est facile et logique de se dire qu'à côté, on a le reste: la famille, les amis, les loisirs personnels... mais, ça ne fonctionne que si on n'est pas encore tombé dans la spirale infernale de la dépression consécutive aux conditions de travail. Parce que dans ce dernier cas, même ces évidences là se délitent, parce qu'on devient incapable de les voir, ou de les accepter.

    Bref, tout ça pour dire que le travail est aujourd'hui le centre de nos existences, et à ce titre, ne peut plus être considéré comme le simple moyen de gagner sa croûte, mais bien comme un élément majeur de notre construction personnelle. Et qui dit personnelle, dit fragilité psychologique mise en exergue. On ne peut que se féliciter de la prise de conscience de la médecine du travail, des CHSCT et des syndicats de la problématique, mais - peut être suis-je par trop désabusée - je ne vois pas à ce jour comment on pourrait inverser la tendance. Vraiment pas.

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  7. Alaiya, message trés beau et trés touchant. Merci de ta contribution.

    Tu as raison sur cette pression qui retombe en goutelette fine. Souvent d'un supérieur direct, qui joue aussi un role de petit chef. Nous sommes cadre tous les deux, et j'ai la faiblesse de croire que nos n+1 sont moins "petits cheffaillons" que dans des postes plus opérationnels. Pour autant, nous ne sommes pas épargnés, et nous deux sommes des témoins de ce que provoque ces pressions.
    Concernant les "bons managers", j'en ai deux en tête. Dont un, mon premier chef, qui reste un ami, un guide, et une personne que j'aime vraiment. Et qui en a pris dans la tête, mais a toujours protégé ceux qui étaient sous ses ailes... Merci monsieur.

    Tu as raison aussi, nous ne sommes pas tous égaux. Devant le stress, devant d'autres choses de la vie. Moi même je pensais être fort, et je vois comment un mail ou un mot ou un post posté sur un blog ou un forum peut me faire battre mon coeur de manière incontrolée... Oui, nous ne sommes pas égaux.
    Certains arrivent à être trés forts dans des situations difficiles et douloureuses. Le chevalier du Phénix est super bon quand ça brule les pieds, et celui du cygne quand on se gèle les arpions... Nous, c'est un peu plus difficile, non ?

    Et tu as raison enfin quand tu dis que le dehors est salvateur quand "n'est pas encore tombé dans la spirale infernale de la dépression consécutive aux conditions de travail". Là encore cas personnels, même si ce n'était pas à proprement parler une dépression, l'été 2005 a été dur et ma santée a durement été touchée. Pourtant, j'étais pas seul...

    Enfin, sur ton pessimisme, je vais te faire un aveu : je suis aussi pessimiste. Simplement, j'acte le fait que ce sujet commence à être pris en compte. Et je pense que ça doit être un combat important et prioritaire...

    Merci de ton post Alayia. Trés beau commentaire de ta part...

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  8. je viens en retard. Il y a aussi dans nos métiers de service le fait qu'il n'y a qu'un échelon. Indépendance vis à vis de la direction, sauf pour vous proposer un nouveau client ce qui ne se refuse pas (confiance). Rien qui indique à quel point s'investir, mais la seule façon de supporter son boulot c'est de le faire bien. Et refus de faire retomber sur l'échelon suivant

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